mercredi, juin 10, 2009

L'Examen (version francaise)

Adapté par Regis Prat


- Interdit de copier! Principe fondamental lorsqu’on reçoit ses feuilles d’examen. Les surveillants ne doivent pas discuter entre eux, ne doivent faire aucun commentaire ou sortir de la salle, et plus généralement, ils doivent s’abstenir de tout comportement susceptible de gêner le bon déroulement de l’examen. La voix du proviseur sonna fort et clair dans le silence profond et étouffant de la salle des professeurs. Elle était remplie d’enseignants qui se sentaient humiliés par ce ton culpabilisant. Une voix, près de moi, chuchota :
- Que ce passerait-il si un surveillant avait une faiblesse ? Je me tournai et aperçu la plus jolie enseignante qu’il m’ait été donne de voir depuis longtemps. Elle avait un corps menu et délicat, qui disparaissait presque dans le fauteuil dépenaillé où elle était assise. Elle avait une coupe de cheveux très courts et assez inhabituelle. Cheveux est un bien grand mot, car son crâne était quasiment tondu. Cela représentait un étonnement de plus pour moi. Un instant, je pensais rêver. Je n’arrivais pas à saisir le fait qu’elle se trouvât la, ni comment on avait pu l’embaucher.
Il devait y avoir un besoin criant d’enseignants ! Me dis-je. Sans oser regarder encore dans sa direction. Puis je me suis entendu lui répondre – dans ce cas, le collègue le plus proche devra pratiquer la respiration artificielle. Pourquoi avais je dis cela ? Je n’en avais aucune idée ! Je ressentais une impression étrange, comme si quelqu’un me soufflait des mots dans l’oreille, et qu’il me fallait les reproduire. Il me semblait qu’elle avait souri. De sa petite voix douce elle ajouta :
- Pardonnez-moi si ma question vous a apparue incongrue, mais c’est mon premier examen en tant que surveillante.
La musique de sa voix me berçait. Une autre question traversa mon esprit. Pourquoi n’ai-je pas remarqué cette fille, avant ? Sûrement parce que nous travaillions en deux groupes et elle n’était pas dans le mien. Un événement comme celui d’aujourd’hui représentait quasiment la seule chance pour que nous nous rencontrions. Tout de même, pourquoi ne l’ai-je pas vue plutôt ? N’allez pas conclure de cela que j’étais un coureur de jupons, car ce n’est vraiment pas mon style. Non, c’est plutôt que voir une femme, si en dehors des normes de la profession, a produit sur moi un effet très spécial. Un peu comme quand on aperçoit le premier perce-neige, à la fin d’un long hiver, on ne voit que lui ! Ainsi je la voyais à ce moment-là, ainsi je la vois encore. Avec elle, la profession recevait de bons augures, notre collège aussi, et moi avec. Un bruit désagréable me tira de ma rêverie. Le froissement des papiers qu’on distribuait aux enseignants. Pendant ce temps, j’avais manqué le reste des instructions mais c’était égal, car avec les années je les avais mémorisées complètement, c’étaient toujours les mêmes, au mot près. Le proviseur prononça mon nom, puis un nom inconnu. Je la vis se lever et mon cœur s’arrêta une seconde pour ensuite battre frénétiquement. Ce pouvait-il donc qu’on passe les trois heures suivantes dans la même sale d’examen ? Quand j’y pense maintenant, je trouve un peu ridicule, mon excitation de ces moments-là. Le collège n’allait pas tarder à fermer ses portes pour l’été, et qui pouvait garantir que je la verrais à nouveau, à la rentrée prochaine ? Le proviseur pouvait lui trouver un remplaçant, ou bien elle, un chevalier servant. Je construisais sûrement des châteaux sur le sable, en nous imaginant des relations plus intimes, ce devait être une erreur de jugement qui se heurterait à la réalité comme la première vague venue sur un écueil. J’ai attendu qu’elle sorte, puis elle m’a précédé dans la salle d’examen. En chemin, je l’ai trouvée plutôt maigre, ses yeux brillaient de milles flammes faibles, quand j’ai tenté une bonne blague. C’est tout moi, quand je suis gêné, il faut que je raconte quelques vannes stupides dont le résultat est invariablement un sourire poli. Il me sembla pourtant qu’elle fit des efforts pour trouver spirituelles et originales les deux ou trois histoires que je lui avais racontées. Et cela m’enchanta en rentrant dans la salle. Je lui laissais le soin d’instruire les élèves sur les modalités de l’examen, me contentant seulement, d’ajouter quelques précisions. Elle voulut s’asseoir, je lui offris une chaise.
En plein milieu de l’examen, alors que nous ne respections pas le règlement, en parlant tout bas, elle tituba, tenta de s’appuyer contre le mur derrière elle, et je la vis qui allait s’effondrer. Ce fut rapide et imprévu, j’avais dû remarquer une fragilité dans son allure et sa manière de parler, quelque chose d’erratique et de fiévreux, aussi fis-je un bon vers elle, pour la rattraper dans mes bras. J’étais stupéfait, ne sachant que penser, ni que faire. Je me demandais s’il fallait l’étendre sur le sol et appeler au secours, mais j’écartai cette idée comme trop brutale. Je regardais les élèves, ils étaient pétrifiés comme si un magicien leur avait jetés un sort. Sans réaliser ce que je faisais, je me vis embrasser ma collègue sur la bouche. Ses lèvres étaient froides. Je frémis, elle ne pouvait pas être morte ! Puis je me souvins, de cette réponse curieuse que je lui avais faite. Ce n’était pas sérieux et pourtant cela allait se réaliser. J’ai pris mon souffle et je l’ai transféré dans la petite bouche humide et froide. J’appuyais sur sa poitrine avec mes mains, pour la ramener a la vie. Enfin elle rouvrit les yeux. J’y lus toute la tristesse du monde, puis elle s’est rassise.
- Je vais bien, merci.
- En êtes vous sure ? Voulez vous que j’appelle un auxiliaire médicale ?
- Non, merci. Ca va… vraiment ! J’ai connu une faiblesse, comme je vous l’ai dit. Vous vous en rappelez ?
- Oui… oui.
- Ne vous inquiétez pas ! Continuons…
A la fin des trois heurs, les élèves quittèrent la salle, en nous jetant des regards insistants.
- Puis-je te tutoyer ?
-Oui, bien sur.
- Laisse-moi te ramener chez toi. Tu dois te reposer.
- Bon, d’accord, mais pas chez moi, ça peut attendre. Emmène-moi quelque part !
En nous dirigeant vers ma voiture, je vis qu’elle retrouvait ses forces, des couleurs lui montaient au visage.
- Allons vers la plage, je connais un endroit désert, dit-elle. Elle parlait vraiment d’une manière curieuse. Je la sentais près de moi, et elle m’attirait terriblement. Je pensais à l’attraction du jeune homme pour la prostituée malade dans « Crime et châtiment », quand Raskolnikov subit le magnétisme irrésistible de Sonia. Ici c’était sensiblement différent, elle n’était pas une femme facile, je le sentais, moi je n’étais pas non plus Raskolnikov, je n’avais tué personne. En fait, j’étais intrigué, je désirais en savoir plus, mieux la connaître, ou simplement être avec elle, jusqu’ au bout.
En voiture, sur le chemin sinueux qui menait à ce lieu isolé dont elle avait parlé nous discutâmes un peu plus.
- Je t’ai fait un peu peur, admet le ! dit-elle en riant. Ca t’a fichu un coup ?
- Pas vraiment, j’ai essayé surtout de ne pas perdre la tête.
- En tous cas, tu as fait du bon travail, même si j’aurais sûrement retrouvé conscience par mes propres moyens.
J’ai mis de la musique, puis je me suis garé sous un gros arbre à l’endroit souhaité. Je l’ai aidé à sortir du véhicule. Nous avons enlevé nos chaussures pour marcher sur le sable. La mer était comme je la préfère, avec des vagues moyennes qui s’écrasent sur la plage en faisant jaillir l’écume. J’ai regardé la fille, elle avait un sourire mélancolique. Ses yeux étaient luisants et humides, tout comme les vagues.
- Connais-tu le conte d’Andersen « La petite sirène » ? Est-ce qu’il ne t’est jamais venu à l’idée que tu lui ressemblais ?
- Je suis la petite sirène ! dit-elle et bientôt je ne serai plus que de l’écume dans la mer.
J’avais du mal à supporter ce jeu où je ne comprenais rien.
J’ai crié :
- Mais enfin, quel est ton problème ?
- Leucémie – dit-elle calmement, j’aurais pu mourir aujourd’hui ou ce soir, ou demain. Ce sera pour bientôt, de toute façon.
Cela m’a frappé avec la force d’un train en marche, et pourtant je m’attendais à quelque chose de ce genre. J’espérais malgré tout ne pas entendre cela. Sa faiblisse m’avait donné des indices. Je l’ai attirée vers moi, dans mes bras, tout contre moi. Je sentais palpiter son cœur.
- Peux-je faire quelque chose ? dis-je – pourquoi es tu venu travailler aujourd’hui ? J’étais incohérent, mais je m’en foutais.
- Tu en as assez fait ! Quant à la raison pour laquelle je suis venue aujourd’hui … je voulais tout quitter, m’engager dans une action machinale, trouver un dernier recours pour m’affirmer, je ne sais pas trop… être parmi d’autres gens, attraper une dernière vision du monde vivant…
Je sentais des sanglots dans ses paroles. Je me suis écrié :
- Je ne veux pas te perdre, je veux rester à tes cotés… Je t’aime !
- Vraiment ? dit-elle d’un air incrédule, je dois avouer encore une fois que pour moi-même, l’explication manquait. Tout d’un coup, je le sus comme je le savais, à partir du moment où je l’avais rencontrée. J’avais dit la vérité, connue de mon être profond, dés le début.
Elle se dégagea, me fixa dans les yeux.
- Je te crois – dit-elle.
Puis, elle enleva sa chemise et son bikini. Elle me tendit les bras.
- Viens !
J’ai ôté mes vêtements sans cesser de contempler la plus belle femme que j’avais jamais rencontrée. Nous avons fait l’amour sur la plage. Au début je sentais qu’elle était au bord de deux mondes, tandis que je l’embrassais et la pénétrais, puis il y eut comme un certain détachement, et elle s’est donnée complètement. Allongés sur le dos, je la caressais tendrement.
- Tu ne vas pas mourir ! ai-je dit le souffle court, il y a plus de vie en toi que chez n’importe qui en bonne santé !
- Bon… si tu le dis… et pour la première fois, la tristesse avait quitté son sourire. Nous nous sommes levés, main dans la main, avons couru vers les vagues, éclaboussant le sable blanc. Son visage était radieux. On batifolait dans l’eau. On s’embrassait et on nageait. Nous savions qu’on resterait toujours ensemble, elle moi et la mer.
Depuis, je reviens a cet endroit. Je vois l’écume qui s’étale, les vagues qui dansent, je sais qu’elle est la ! Je la sens pressée contre moi, elle rit aux éclats, nous faisons l’amour, elle, moi, et la mer.

vendredi, juin 05, 2009

Rencontre avec un barracuda

Traduit par Regis Prat

C’était durant le lointain été de 1995, nous avions décidé d’aller à la mer, moi et deux de mes collègues de l’université, qui étaient plus connus sous le nom de : « Tête-nue et de Naseau ». Comment avaient-ils reçu ces surnoms est une longue histoire. Ce qui peut avoir une liaison quelconque avec la nôtre, est que le deuxième évitait de nager sur le dos car généralement, les sauveteurs, en l’apercevant, donnaient l’alerte suivante : Attention, requin en vue ! Quant au premier, il avait l’habitude de plaquer sa petite amie, juste au moment de partir en vacances, car il espérait obtenir des succès sur place, et ce n’était que quand il n’en avait aucun, qu’il téléphonait à la délaissée pour qu’elle vienne aimablement le sauver d’un régime sec. Moi, je n’avais pas de copine à attendre et je pouvais nager sur le dos autant qu’il me plaisait sans provoquer de complications. Je me réjouissais donc du séjour au camp étudiant (Academica), proche de camp étudiant (Botev), situé sur un terrain sombre entre Ravda et Nessebar. Le début de notre séjour, commença de manière fort prometteuse. Apres une attente d’environ trois heures, pour recevoir la clé de notre bungalow, nous allâmes contempler ce qui serait nôtre domicile pour les dix jours suivants, et remarquâmes qu’une des fenêtres était partiellement détruite, à un point tel toutefois qu’un honnête cambrioleur, devant elle, n’aurait pas hésité à pousser plus loin. Quand nous parlâmes de ce léger désagrément à l’administratrice, elle nous affirma, qu’en fait, ceci était le résultat d’un cambriolage, réalisé juste avant que nous arrivions, et que nous n’avions pas à nous inquiéter, vu que la probabilité d’une seconde visite en si peu de temps, était fort improbable. Naturellement un fait aussi insignifiant ne pouvait nous déranger en aucune façon. Nous prîmes possession du bungalow, et défîmes nos bagages. Apres cinq minutes, chacun de nous, comme un seul homme, regarda ce que faisaient ses voisins, et chacun de nous, tenait dans la main une paire des chaussettes sales.
Nous fîmes état devant les autres, de nos modestes moyens financiers pour dix jours, et ceci excluait pas mal de choses. L’une d’entre elles était le taxi. Des le début mes deux camarades établirent un programme journalier qui ressemblait plus ou moins a ceci :
11 heures – lever. De 11 heures a 12 heures – procédures matinales, toilette, etc. De 12.30 a 13 heures – préparations pour la plage. 13.30 -14 heures – départ à pieds pour Nessebar, après un léger petit déjeuner a la cantine. 14-14.30 – déjeuner. 14.30 – 15.20 – trajet pour la cote du soleil. Une fois là, nous allons à la plage. Il y a des types ne parlant pas le bulgare, ils sont étalés sur des chaises-longues avec l’attirail complet pour lutter contre les coups de soleil et les brûlures. Apres deux heures sous le soleil vif (nous étions les seuls à ne pas être protégés des rayons solaires, vu les tarifs des parasols et autres extras) nous retournons à Nessebar, à pieds, cela va sans dire, jusque au camp. De 17 heures a 19.30 – la plage locale. A 19 heures – retour à la cantine, à 20 heures – retour à Nessebar, puis promenade dans les rue de la cité jusqu’ à 22 heures, puis, nous prenons un bus pour « la Côte du Soleil », direction la discothèque « Iceberg » (j’ignore si elle existe toujours). Vers une heure du matin, retour sur Nessebar (à pieds !). Une course en taxi, aurait englouti notre budget en entier. Retour au camp, puis la discothèque locale, de 2 à 5 heures à peu prés. Apres ca, gros dodo jusqu’à 11 heures, et rebelote. Ce modeste programme aurait dû être respecté à la lettre… Naturellement, mon plein accord n’était pas souhaité. Comme nouveau dans le groupe, il me suffisait d’obéir aux règles établies. Deux jours suffirent pour que je me rebelle, ou plutôt, c’est mon organisme qui le fit. Je tombai malade. Je faisais de la température, et dus garder le lit. Le régime de circulation entre les nombreux points de passage, avaient semé la révolte dans mon âme et dans mon corps, il était temps de hisser le drapeau blanc.
Naturellement, mes deux amis compatirent à mon malheur, d’un air moqueur. Je dus subir, une leçon en règle, comme quoi, je n’étais pas apte à la vie dans les camps de vacances, et que j’aurais dû les avertir sur le fait que je ne peux tenir plus de trois jours hors de ma maison, que je ne peux pas supporter la musique noire, et qu’ à la discothèque Iceberg, par dessus le marché, je désire, vers une heure du matin, être couché depuis longtemps. Je leur rétorquai que je ne pouvais pas excéder mes capacités et que malgré mon statut de minoritaire au sein du trio, j’avais quand même des droits comme eux, et notamment, pouvoir rester au lit, et être malade en paix.
Ce léger contretemps, fut le début d’une nouvelle période dans nos relations au camp. Ils me dirent que, finalement je n’étais pas un petit enfant et que je pouvais me soigner tout seul. Des le lendemain, ils partirent rejoindre les endroits que nous connaissions, quant a moi, je goûtais avec délectation, un vrai repos. Ma température me gênait un peu, et je dus me lever pour chercher des médicaments. Je tombai sur une jeune maman, une étudiante qui promenait son bébé. Elle me sauva, en m’indiquant exactement ce que j’avais, ce qu’il fallait prendre pour me retaper, elle me donna même quelques comprimés. Je la remerciai chaleureusement, et après avoir suivi ses prescriptions deux jours, je me sentais beaucoup mieux. Exactement à ce moment-la, ce fut au tour de mes dénigreurs de pousser la température et de se retrouver en position horizontale, au milieu du jour. Il était clair qu’un tel programme se révélait trop dur, même pour des dragueurs aussi invétérés qu’eux. Je décidai de limiter mon territoire d’action, à la plage du camp.
- N’y va pas, me dit Naseau, nous avons lu dans un journal, que dans la baie, on a vu un barracuda.
- Ah bon, et alors ? répondis-je.
- Comment, alors ? ajouta Tête-nue, ce truc-la peut te dévorer, et après, qui va-t-on incriminer parce que tu ne te fais pas à notre régime, hein ?
- Pourquoi me dévorerait-il, moi exactement ? dis-je.
- Tout le monde se dit ça, tant qu’il n’a pas été dévoré, repris Naseau en faisant une grimace, soit sûr que ceux que les requins ont avalés pensaient à cela.
Ici, je dois faire remarquer que les réactions des gens qui avaient vu Naseau nager sur le dos, avaient fini par créer chez lui une phobie des requins.
- Laisse tomber… qu’il fasse ce qu’il veut, ajouta Tête-nue, comme c’est parti, aucune poulette ne va tomber dans mon lit, je ferais mieux d’appeler ma chérie pour qu’elle s’occupe de moi. Il y aura un lit de libre.
Cette dernière réplique me parut fort grossière. Cela ne me surprit pas outre mesure, mais être envoyé à la mort par des mots qui suintaient une telle indifférence, cela faisait un peu trop pour moi. Je décidai, sans plus de cérémonie, d’aller me promener sur la plage et les pontons. Il y avait plein de gens affalés comme des phoques, recherchant les précieux rayons, dans un état de nudité, plus ou moins total. Je pensais qu’il serait mieux d’attendre que la plage soit moins encombrée, pour nager un peu. J’aime beaucoup la natation en solitaire, quand je suis uni avec la mer. Je me retrouve, dans ces moments-là, avec les petits crustacés dans leurs coquilles de toutes formes, sur leur lit limpide et mouvant de vaguelettes, bercés par le flux et le reflux. J’aime nager dans cette eau, si je ne rencontre pas trop de méduses, puis retourner vers la plage en me concentrant pour éviter les contacts piquants.
Je m’assis et regardai comme les petites vagues venaient lécher mes pieds dans de doux éclaboussements. Puis je me levai en laissant derrière moi un chapelet de petites algues mêlées de grains de sable. Je choisis un rocher confortable pour m’allonger et je somnolai. Une brise légère caressait ma peau, le bon air marin saturé d’iode et d’odeurs maritimes agit sur moi comme un somnifère. Au réveil, je compris dans ma chair j’avais pris un joli coup de soleil et que rentrer alors dans la mer, ne serait pas une bonne idée. Il était à peu prés 19 heures et par conséquent, je devais diner. Par quelque coté, que l’on considère ce problème, un homme, malgré les changements qui peuvent s’opérer, garde l’habitude de manger le soir venu. Chez moi, cette habitude était nouvelle, du moins à la cantine du camp, mais elle restait encore une de celles que j’entendais ne pas perdre. J’y rencontrai mes deux compères. Ils me jetèrent un coup d’œil amusé.
- On dirait que tu nous évites, dit Naseau.
- Ne nous dis pas que tu es allé à la rencontre du barracuda, ajouta Tête-nue.
- Pas encore, mais j’en ai l’intention ! affirmai-je.
- Sérieusement ? demanda Tête-nue, bon, alors je vais téléphoner à ma dulcinée pour qu’elle vienne.
- Je pensais que tu l’avais déjà fait, m’étonnai-je.
- Je ne suis pas comme ça, s’offusqua Tête-nue, les copains d’abord.
- Et même avant les femmes ! confirma Naseau.
- Tu vas pas te vexer, non ? On déconnait, rajouta Tête-nue, c’est vrai que depuis peu, c’est pas la grande forme, mais ca va s’arranger.
- Vous vous soignez ? demandai-je.
- Notre mal ne se guérit pas facilement, il faut d’abord reprendre conscience, répondit Tête-nue.
- Je pense aller nager cette nuit ! dis-je soudainement.
J’ignore pourquoi je l’ai dit. Peut-être parce qu’ils ne regardaient cette mer que j’aimais tant, que comme un bien de consommation, alors je cherchai quelques choses d’irrationnel, d’aventureux. Ils me regardèrent dubitativement.
- T’es pas un peu toqué, non ? demanda Tête-nue, qu’-est ce qu’il y a de si excitant à nager la nuit ?
- Ecoute R.E.M. - Night Swimming. Là est la réponse, dis-je.
- C’est un chouette morceau, affirma Naseau.
- Chouette ou pas, moi j’ai envie d’avoir des petits enfants, ajouta Tête-nue, je vais donc travailler sur la question, car pour cela je dois avoir des enfants en premier, mais on dirait que les poulettes ici, sont plutôt bêcheuses.
- Peut-être, parce que quand elles nous voient tous les trois ensemble, elles prennent peur. Quand le barracuda l’aura bouffé, on aura surement plus de chance, dit Naseau.
- N’invoque pas la chance, observa Tête-nue, l’an dernier, des le premier soir, je me suis fait une nénette. Cette année, je collectionne les vestes. Apres tout, c’est pas bête ton idée. Va nager avec le barracuda, s’il te mord, tu fais demi-tour, si tu t’en sors, tu seras un héros, on en parlera dans la presse locale, ainsi que de nous, tes fidèles amis. Notre côte va remonter, et ça donnera de bons résultats.
- Merci pour ta bénédiction! dis-je en me levant.
- Ou vas-tu ? demanda Naseau.
- Mais… chez le barracuda! répondis-je.
Je m’enfuis littéralement de la cantine. J’avais dépassé le point de non-retour. En parlant ainsi, en insistant, surtout sur ma dernière réplique, il y allait désormais de mon honneur. J’attendis une heure plus tardive, et vers 21 heures, j’enfilai mon maillot de bains sous mon bermuda, et la serviette à la main, je pris la direction de la plage. Si quelqu’un me rencontrait, il se dirait que je vais aux douches. La plage était déserte, on apercevait ici et là, les lueurs des bars, en bord de mer. Je me mis pieds nus. Le sable était froid. Il me vint à l’esprit que je pourrais ne pas voir les déchets de repas laissés par les estivants et que je pouvais me blesser sur un bout de verre, mais cette idée disparut vite, devant le spectacle de l’écume marine qui venait masser mes jambes dans le reflet d’un rayon de lune. Il me restait quelques pas à faire, mon cœur battait très fort. J’avais déjà nagé la nuit. Je pourrai voir devant moi car il y avait pleine lune, et je n’aurai qu’à suivre le chemin de son reflet sur la mer, qui se perdait à l’horizon, un chemin d’or lunaire. J’hésitais sur la distance à parcourir. Jusqu’à la bouée, c’était un peu court, jusqu’ aux balises qui marquaient les limites de la baie, c’était un peu loin. A mi-chemin, il y avait des méduses que je ne pourrai pas voir, mais je les sentirai sans nul doute. Cette perspective ne m’enchantait guerre, sans compter que dans ce secteur, quelque part un barracuda rôdait, s’il y en avait vraiment un. Je laissai mes affaires, et entrai dans l’eau. Je sentis aussitôt comment la mer était mon élément. L’eau était chaude comme de thé. Et la nuit, tranquille et silencieuse. Dans mes oreilles résonnait Night Swimming – night swimming deserves a quiet night. I’m not sure all these people understand.
……… the recklessness of water… they cannot see me naked… cette dernière phrase me fit sourire… could not describe night swimming… j’avais de l’eau jusqu’ à la taille. Je marchais sur un fond régulier, sans coquilles cassées, car j’avais essayé de me rappeler un endroit où j’étais déjà venu. Je pris mon souffle et m’élança. La mer m’accueillit en me dirigeant vers la lune. Je m’immergeai un moment. J’utilisais la brasse avec des mouvements larges et lents, qui faisaient des vagues dans mon sillage. Puis je m’arrêtai en regardant et en écoutant. La nuit était muette, si l’on excluait le clapotement des vaguelettes. J’atteignis la bouée assez vite, et songeai à pousser plus loin quand j’entendis un fort claquement à proximité. Je regardai autour de moi craintivement, mais je ne vis rien. Ce devait être un gros poisson qui avait sauté dans l’air puis était retombé lourdement. Je n’en attendis pas davantage pour regagner la côte dans ce qui dut être le crawl le plus rapide de ma vie. J’atteignis la cote avec des efforts mais la mer, comme d’habitude, ne voulait pas se séparer de moi. Je m’accroupis complètement essoufflé mais j’étais heureux. Je n’avais pas pu résister à la tentation. De nouveau, j’avais découvert un des grands secrets de la mer et peut-être que j’avais rencontré un de ses terribles gardiens : le barracuda, mais ce n’était pas certain. Je m’enveloppai dans la serviette et j’allai prendre une longue douche. Je revins au bungalow d’excellente humeur, en riant intérieurement de mon comportement et de mes craintes. J’étais sûr d’avoir mal interprété le claquement. Il se pouvait que ce fût la bouée, ou tout simplement, deux vagues qui s’étaient heurtées.
Rempli de ces pensées, un sourire aux lèvres, je poussai la porte du bungalow. Les deux copains me regardèrent étrangement de leurs lits.
- Vous en faites une tête, di-je, quelques chose qui va pas ?
- Tu es donc revenu ! dit Tête-nue en ouvrant grand la bouche.
- A quoi ressemble le barracuda? demanda Naseau, en tremblant un peu.
- Nous avons joué ensemble, répondis-je en essayant de ne pas éclater de rire, et puis je l’ai laissé partir.
- Non, tu déconnes, dit Naseau, c’est pas vrai ?
- Je l’ai attrapé, et pas qu’un peu.
- Si tu l’as attrapé, pourquoi l’as-tu relâché, dit Tête-nue l’air amusé.
- Parce que demain, je veux le revoir, leur dis-je. Puis je me couchai et je m’endormis aussitôt. Au moment, où je fermai les yeux, je m’enfonçai dans la mer parmi les vaguelettes sous la lumière de la lune. Je nageais toujours plus loin, le chemin d’or m’invitait à continuer encore. L’eau me couvrait et me massait le corps et le visage. Apres une centaine de brasses je m’arrêtai et me mit sur le dos, dans le lit le plus anatomiquement doux du monde. J’ouvris les yeux, l’eau salée les chatouillait. Je me trouvais à la verticale parfaite de la lune sur la voûte étoilée. C’était calme et silencieux. Je contemplais toutes les constellations que je connaissais. La Grande Ourse, La Petite Ourse, Orion. Et alors, dans le clapotement léger des vagues, j’entendis night swimming deserves a quiet night… I’m not sure all these people understand…

mercredi, mai 27, 2009

Le Triton Doré

Adapté par Regis Prat

Oncle Ivan passait pour un pêcheur passionné parmi ses amis. La semaine dernière il est allé chercher des carpes dans un petit lac où il a ses habitudes. Et il lui est arrivé une aventure pas commune. Le temps s’étirait, les ondes du lac ne faisaient pas trembler le bouchon, quand tout à coup, ce dernier disparut brusquement du regard embué d’Oncle Ivan, en le tirant de sa torpeur. Le bouchon plongea de nouveau, puis fit surface. Oncle Ivan, avec son expérience, évalua la situation, compta jusqu’ à quatre et ferra avant que le bouchon ne disparaisse encore. Il ramena la canne à pêche juste au moment ou ce qui se trouvait sous la surface, mordit gaiement dans le ver charnu. Ce que vit Oncle Ivan, était la créature la plus étrange qui jamais avait fait vibrer sa canne à pêche. Un genre de dinosaure miniature, doré et humide, le regardait avec des yeux gonflés par une profonde indignation.
-Aaah ! S’écria Oncle Ivan, superstitieux comme tous les pêcheurs, et bien persuadé de l’existence des méchants esprits de l’eau. Une petite voix chuchota – relâchez-moi et je vous accorde trois souhaits.
- Quoi ! – qui a parlé? demanda l’homme en regardant autour de lui.
- C’est moi – dit la créature en faisant bouger ses lèvres boudinées, je suis le triton doré !
- Je connaissais seulement le poisson doré – répondit Ivan, d’un air embarrassé.
- Oui, c’est un de mes collègues mais il n’habite pas dans votre lac, dans ces parages, il n’y a que moi. Alors, dites moi ce que vous désirez, et après ça, remettez moi dans l’eau parce que ma peau fragile, se met à sécher.
- Vraiment ?? Je n’arrive pas à y croire.
- Je vous écoute… et bien… je veux… je voudrais…. c’est pas facile… hésitait Oncle Ivan en se grattant la où ça ne le démangeait pas pourtant – a… oui… c’est ça ! Je voudrais un palais immense.
Aussitôt demandé, aussitôt reçu. Un grand fracas se produisit, la terre se mit à trembler, et quand il regarda en direction de sa maison, il vit à coté, un superbe château d’or et de diamants.
- Tu ne plaisantais pas, alors !?
- Pas du tout, déclara l’animal amphibie, quel est votre deuxième souhait ?
- Je peux réfléchir quelques secondes ?
- Non, ce n’est pas ainsi que vous devez faire, dites moi vos souhaits les uns après les autres, ou tout ce que vous désirez disparaîtra !
- Ah ! Avec le poisson doré, c’était différent !
- Je ne suis pas le poisson doré !
- Bien. Alors je veux, … je voudrais… que la plus jolie des princesses devienne ma femme.
- Oui, après ?
- Comment, c’est déjà fait ?
- Mais oui ! Elle vous attend dans votre palais !
- Oh, c’est merveilleux ! dit Oncle Ivan, les yeux brillants de bonheur, voyons, que reste-t-il ? … Ah ! Oui… je veux devenir député au parlement !
- Ayant exaucé son dernier souhait, le triton, libéré de l’hameçon, sauta dans l’eau.
Oncle Ivan se retrouva instantanément dans l’enceinte parlementaire, au milieu d’une séance plénière, où l’ordre du jour lui parut ennuyeux. Il vota, car la procédure l’imposait, tout en sachant que quel que soit le résultat, il ne comprendrait pas de quoi il s’agissait. Il s’impatientait, et de la fin des débats, sauta dans un taxi, pour rejoindre son village, quelque part près de Dobrich. Ses attributions de député lui permirent largement cette dépense. Quand il entra dans son magnifique palais, la princesse bavardait joyeusement avec un jeune homme qui la serrait dans ses bras.
- Comment ! hurla Oncle Ivan, je t’ai vue, n’as-tu pas honte ?
- Nullement, car il n’y a aucune raison, dit la princesse en le dominant de toute sa nudité, tu es toujours absent, tu as même raté nos noces, je n’en peux plus, je ne suis pas habituée a cela. Aladin, et d’autres princes m’ont beaucoup mieux traitée!
- Bon ! Puisque c’est ainsi, on vendra le château et on s’installera à Sofia.
- Non, je ne suis pas d’accord – répondit-elle hargneusement, je ne veux pas être toute seule là-bas non plus. Mieux vaut rester ici !
- Bon, je quitterai mon poste de député pour rester avec toi le jour et la nuit, bien que je t’en veuille beaucoup.
Et Oncle Ivan quitta le parlement au grand étonnement de ses collègues. Au palais, des mauvaises surprises l’attendaient. Ses employés et serviteurs, exigèrent la garantie qu’ils seraient payés pour leur labeur. Ivan les assura qu’ils devraient se sentir fier de servir un homme tel que lui mais ils étaient incapables d’apprécier sa gentillesse. Ils quittèrent donc les lieux, en emportant tout ce qu’ils pouvaient comme compensation aux deux jours de travail qu’ils venaient d’effectuer. Oncle Ivan se tourna vers la princesse, plein de désir.
- J’ai fait comme tu le voulais. Alors quoi maintenant ?
- Je n’ai jamais réclamé que personne ne me serve rien à manger, de plus, il y a un courant d’air ici, vu qu’ils ont emporté toutes les portes et les fenêtres. A quoi pensais-tu en agissant ainsi, cria la princesse en tapant rageusement des pieds, puis elle le laissa sur place et partit pour la capitale. Pour autant que l’on sache, elle vit maintenant, dans le luxe, en compagnie de « nouveaux riches ».
Oncle Ivan a dû démolir son palais car, premièrement, il ne pouvait plus l’entretenir, deuxièmement, il ne pouvait pas payer pour qu’on le maintienne à sa place. Et enfin, le château était construit illégalement.
Aujourd’hui, je suis à la pêche avec Oncle Ivan, c’est lui qui m’a tout raconté pour passer le temps. Moi, à sa place, je vais vous dire, j’aurais demandé les mêmes souhaits, à l’exception du troisième, mais je pense que cela se serait terminé de la même façon.
- Il faut anéantir tous les tritons dorés avec du TNT, dit Ivan d’un ton lugubre.
En laissant couler une larme, il fixe le bouchon qui semble lui faire un clin d’œil. Je regarde le mien, quand soudainement, il se met à plonger…

mercredi, octobre 29, 2008

A Day in Constanta

The Father from Plovdiv

Chapter I – A day in Constanta

- Est-ce que tu connais quelqu’un qui a vendu ses chaussures deux fois? Tu voulais écrire un roman et voulais avoir du matériel pour ça. Donc, dis-moi, est-ce que tu connais quelqu’un qui a vendu ses chaussures deux fois ?

- Tu veux dire quoi exactement ? I asked Regis as we were sitting at a bar overlooking the beach in Constanta. Regis was a Frenchman who had spent 17 years in Dobrich Bulgaria very much to the surprise of the customs officers at the Bulgarian-Romanian border who spent about 20 minutes pondering over his passport which apparently represented one of the greatest mysteries of Southeastern Europe. Just why he had spent those 17 years in Bulgaria is a long story. Suffice it to say that as a result he had ended up divorced from his Bulgarian wife but in love with Bulgaria in general and Dobrich in particular. Chaque fois que je quitte Dobrich j’ai mal au cœur. He told me one day of many revelations. With him we usually spoke in French and from time to time in Bulgarian. He would sometimes use Bulgarian in a rather funny way, which added a unique flavor to the enchanting stories he told of himself. It seemed he was the only true globe trotter I knew personally. He had been to 60 countries and around the world twice and during one of his trips he had sold his shoes.

- Mais c’est ce que je t’ai déjà dit. Je les ai vendues deux fois et c’étaient les chaussures que je portais aux pieds.

- Vraiment ? I was aware of the fact that there would be no expression in French that I would know which could express to the full extent how puzzled I was to hear that.

- Mais oui. La première fois il s’agit d’une histoire qui s’est produite à Yalta. Je me promenais dans une rue. A cette époque j’étais marin. J’étais célibataire et je prenais plus soin de moi.

Maintenant je suis célibataire encore mais ce n’est pas pareil. J’étais jeune et évidemment attirant pour les femmes. Je portais de très belles chaussures bleues. Je les avais achetées en Angleterre et elles étaient à la mode alors. Bon, il y a un gars qui me voit et qui me dit – donnez moi vos chaussures. Je me retourne et je le vois comme il me suit. C’est un gars de 20 ans ou un peu prés qui me voulait les chaussures. J’accélère mais il me suit et il continue en courant presque. J’arrête et je lui demande – mais vous êtes fou ou quoi ? Comment est-ce que je pourrais vous donner mes chaussures ?- Donnez-les et moi je vais vous donner les miennes. Apres il me dit – je peux vous aider à trouver une belle fille. Croyez-moi. Donnez-les. Vous ne le regretterez pas. J’y réfléchis et après je dis mais bon et je lui donne les chaussures. Il m’a amené sur une colline. Tu sais a Yalta il y en a plein et on s’est trouvé dans un bar prés du bord de la mer. Je m’assois et le gars me demande – qu’est-ce que vous pensez à elle ? Je regarde autour de moi et je lui dis mais laquelle ? Il n’y a personne. Et il me dit – бе сервитьорката бе. Je la regarde et vraiment elle est la et elle me sourit. Elle s’appelait Katya. Elle me dit – ça va vous coûter 20 dollars mais si ça vous plait vous pourriez m’en donner plus. J’ai fini par la payer 30 dollars. Elle m’a plu énormément. Elle était gentille et bien élevée…

Apparently he had noticed what he must have taken for a bewildered expression on my face for he said, - Mais que-est-ce que tu veux? J’étais marin et je me sentais seul. Truth be told, I was rather amused. I was eating the spaghetti Bolognese I had ordered and he was sipping from his coffee. The café itself was rather shabby looking with old wicker chairs and dusty tables and a rather aging waitress obviously very different from the heroine of Regis’s paramour in Yalta. We were in Constanta not Yalta and also much later than the days of Regis’s romantic adolescence. The purpose of our visit to Constanta was a rather prosaic one, too. We wanted to get to the School Inspectorate and ask for jobs for English and French teachers. I personally had had enough of Bulgaria and was ready to leave it at the first really good opportunity knocking at the door. Regis himself had even bigger reasons than mine to want to leave it but he had some rather romantic notions of the country and being unable to make a single move without doing a romantic deed all along, he had sent a letter from Constanta to the last girlfriend he’d had in Dobrich, who had dumped him some weeks before. Surprisingly, it seemed that she just wanted him as a lover whereas he wanted to live with her and as this juncture didn’t suit either, she had stopped seeing him.

The second time he sold his shoes off his feet had to do with his encounter with a starving boy in Haiti where he rather gave them away to the boy and then bought himself another pair. I knew he was completely capable of doing such a thing unable to stand suffering on part of the others. We were still eating at the bar and I was still thinking about the mysterious ways you could part with your shoes. It seemed to me that you could do that at any moment if you wanted to save your soul. Of course, you could also exchange them for a favor like Regis had done the first time. In the brittle universe we were living where anything could happen at any moment, losing your shoes then one way or another should be but a matter of course. Immersed in these thoughts I hadn’t noticed the bar manager who was now towering right next to me with a large piece of carton in his hand. He was a gigantic paunchy individual with a rigid expressionless face which reminded me a bit of the rock biter of The Neverending Story.

Paris,” he said and gave me the piece of carton which on close scrutiny turned out to be his Romanian ID card. He spoke neither French nor English and also seemed to articulate rather slowly so I took a chance and said, “Inteleg pucin Romaneste.” I should have known better than to say that because that started him talking faster. He said many things of which I only understood that his father came from Pirin Macedonia. To find a Romanian who is partially Bulgarian by origin is not unusual in Constanta. After all, the Danube divides Dobrudja into two parts – Southern Dobrudja in present day Bulgaria and Northern Dobrudja in present day Romania. Historically the two regions had been in close contact and they had been very much considered one entity before they found themselves parts of two different countries. Both regions had been at different times part both of Bulgaria and Romania. It’s a pity though that in present times the people living there have lost their roots and don’t often visit their relatives living on the other side of the Danube. One of the reasons for that is the lack of common language of communication. As I was to find out the Bar Manager didn’t know a single word in Bulgarian but, of course, he wasn’t to blame. The same could be said of the residents of Southern Dobrudja. They don’t speak Romanian. The only bilingual inhabitants of both regions were the grandparents who lived both in Bulgaria and Romania as a result of the shift of ownership of Southern Dobrudja. Sadly, all this intercultural heritage is now lost as these people are almost all gone. We spoke a little bit more with the Bar Manager in basic English of which he had but little knowledge and then left to find ourselves some 200 meters from Tomis Mall in downtown Constanta. The Irish Pub was right next to us and some 200 meters below lay the Black Sea lapping gently at the natural rocky piers which formed a number of lagoons on the beach. There were the three of us there, me, Regis and Velichko, a 60-year-old man who had been married two times and had 6 children from both marriages. The active married life he’d led had left him penniless so he had waited for us outside grimly munching on some chunky dry sandwiches while Regis and I had lunch at the bar. Outside the weather was gorgeous. The sun shone hard on us on this late October day and having found the institution in question on the map, we had an hour before we could have a talk with the head of the Inspectorate, a certain Mr. Daniel Corbu. Regis went off to get some Romanian magazines to bring to Dobrich on our way back while Velichko and I went looking for a café where to pass the remaining hour. The next café presented itself before us in the shape of another dusty wooden construction with no one sitting outside so we strolled off to the adjacent building – still another wooden construction where two elderly gentlemen were calmly playing backgammon. I spotted a young girl shivering in an alcove built in one of the walls where eternal shade prevailed. When she saw me she said something in very fast Romanian. I only caught the word vorbesc which means to speak. As I didn’t want to take any chances, this time I said, “Nu inteleg Romaneste. She nodded and said, “it’s not for sale.” At first I didn’t understand what she meant because I thought she meant the coffee machine which we had no intention of buying anyway but then she continued, “it’s free for old people.” “I guess we’re not old enough,” I said and she nodded again. I was 35 then but obviously not too old. As for Velichko, he was obviously not very young but not old enough, either. I wondered how old you had to be to qualify for free coffee. The gentlemen playing backgammon didn’t seem to be much older than Velichko but were judged eligible. Or was it just for Romanian pensioners and were we witnessing new-born discrimination in Romania only a year after having joined the EU together with Bulgaria. We went back and sat down at the first café we saw which now enjoyed a full table of visitors basking in the generous October sun. I ordered a decaf which cost 6 lei or 3 levs and felt optimistic about our chances to teach English and French there. I had managed to use French just once with a book-store assistant and English with a couple of more assistants at Tomis Mall. English and French were complètement inconnus outside Tomis Mall, which made it about the only place one could ask for directions in the entire city.

- Tu sais – I turned to Regis as he sat down at our table after getting the newspapers and magazines he wanted. – Constanta me plait énormément. On peut garer sa voiture où on veut à n’importe quelle heure de la journée. I said that watching brand new cars parking about 10 meters away from us in a nearby sea alley.

- Imagine-toi faisant la même chose à Varna ou à Sofia.

- Tout a fait – he said. – En plus, regarde les jolies filles assises sur les bancs à coté de nous. Je crois qu’on pourrait vraiment se détendre ici et si on trouvait du bon travail on serait content.

I had to agree. The pretty girls in question were seated on some inviting wooden benches positioned at the edge of the alley right above the beach. I went over to an empty bench and looked down below. The beach was completely deserted. The three lagoons that could be seen looked lonely and ancient. There wasn’t a single person to be seen there with the exception of a man and a little girl who looked like father and daughter. She frolicked around him on the sandy beach and he followed her trying to prevent her from falling over and hitting herself too hard. Another thing I liked very much about Constanta was the easy accessibility of the beach and the sea. Very much unlike Varna where there would be overbuilt areas all along the stretch of beach so that the only way of going there would be to pass through an eating establishment and pay for it there and then. Ovid may have been right deploring his fate which found him marooned on a bleak beach surrounded by wild people. I felt I would be grateful if the same fate befell me as I was there looking at the languid sea waters breaking gently over the rocks forming the lagoon boundaries. I would be happy to be there and have a lagoon to myself and run on the beach with my little daughter and forget about it all.

I was snapped out of my reverie by a nudge at the elbow so I turned back to see Regis who reminded me that the hour we had had almost passed and we needed to head for the Inspectorate. It was truly a dream in broad daylight and I was still savoring it as I walked in the sun soaked street meandering by the sea. Before long we found the Inspectorate and saw lots of people inside but the door was locked. I suggested entering the building through the open window on the side wall, but after we voted for it I found myself in the minority. Then we looked at the working hours posted on the front door and saw that we should have come the day before. It seemed to me we were pretty much like the three fools by Donyo Donev being at the right place but the wrong time, but then Regis reassured me by saying that it was the right time and that this was juste une promenade de reconnaissance.

On the way back I drove at 150 per hour and covered the distance between Techirgyol and Negru Voda in 16 minutes. I spoke with Velichko who told me about his second wife who was Russian and was back in Russia looking after her blind mother. Regis had meanwhile dozed off on the front seat. Velichko said he was looking to live with his second wife in Doumna which was a small town near Moscow where he hoped to work as a nuclear physicist. He had worked there once but was unsure about his present prospects of finding employment there again.

Three hours later and after work where I had to make some recordings for a Bulgarian course I and a colleague of mine were teaching to some elderly migrants from England who had come to live in Southern Dobrudja, I sat with my wife who was reading Scales by Pavel Vezhinov and she read me the following: it was only now that I realized what bitter mistake we’d made not having children. The more, the better as long as you love them and take care of them. Even if you became besotted overworking yourself and fighting lifelong troubles, you would be saved in the end. The reason why this was so was because you stopped functioning as an egocentric entity. And as a distinct individual, too. You reproduced just like the amoebas for which there is no early extinction or no untimely demise. If we had children maybe we would have no fears throughout our entire lives.

I told her about Velichko and she said he was saved and close to the amoebas.

I felt relieved and went to sleep listening to Pimsleur’s Romanian 1.

vendredi, janvier 26, 2007

Une femme accouche dans le métro

Ceux qui pensent que le métro n’est rien qu’un moyen de transport seront bien choqués d’apprendre que ce week-end un accouchement a eu lieu sur la ligne orange. Pendant que ce drame se déroulait le train n’a jamais ralenti s'arrêtant seulement aux stations sur son trajet.
Les personages principaux dans cette histoire sont la québécoise Marie-Pierre Bienvenue et monsieur Xu Wong d’origine chinoise. Madame Bienvenue serait en train de descendre à la station Cote St Catherine pour qu’elle se présente à l’hôpital Juif General quand elle a ressenti une douleur aiguisée et avant de se rendre compte de ce que se produisait elle avait perdu les eaux. Elle était si confondue par cet événement qu’elle aurait complètement oublié de descendre a la station de son choix. Selon d'autres sources les portes du train se sont fermées très vite parce qu’il n’y avait pas beaucoup de monde sur le train en ce moment. C'est dommage car quelqu’un aurait pu l’aider s’il y avait plus de monde mais parfois un homme peut résoudre tout. Cette vérité a été bien prouvée par monsieur Xu Wong qui aurait été très proche de la femme en détresse quand il s’est tout produit. Il aurait sauté sur ses pieds et porté secours a la femme. Monsieur Xu Wong aurait été docteur dans son pays d’origine, la Chine parce que l’aide qu’il a donné ne manquait rien d’un secours très professionnel. Il se serait présenté à Madame Bienvenue et lui aurait dit qu’il était docteur. Ensuite il a fait tout ce qu’était nécessaire afin que le bébé soit délivré sain et sauf. Il aurait même utilisé de l’eau chaude qu’il portait dans une bouteille pour faire du café à la fabrique de pizza Da Vinci ou il travaillait dans le département d’emballage. L’accouchement aurait commencé vers la station Snowdon et fini à la station Henry Bourassa qui est la dernière station sur la ligne orange en la direction nord.
Tout le monde qui a vu cet accouchement incroyable a applaudi chaleureusement. Madame Bienvenue aurait été si émue par cette aide miraculeuse qu’elle a exprimé la volonté que le bébé porte le nom de son sauveur car elle n’avait aucun doute que sans l’aide de monsieur Wong elle aurait perdu le bébé qu’elle voulait tellement et peut-être sa vie aussi.
Quand on lui a demandé pourquoi elle avait choisi le métro au lieu d’un taxi pour se rendre à l’hôpital, elle a répondu qu’elle était dans une querelle bouillante avec son copain au sujet du nom du bébé jusque à la dernière minute. Apres il a dû partir pour son travail et elle pour l’hôpital.
Cet incident du métro aurait plus de conséquences qu’on pourrait prévoir. D’après certaines autorités qui veulent pour l’instant rester anonymes, il est très probable que la station Henry Bourassa soit renommé Xu Wong car le porteur présent de nom serait beaucoup moins célèbre que monsieur Wong dans l’avenir proche. Monsieur Wong et Madame Bienvenue seront les deux accordé un permis de voyager dans le métro gratuitement pendant l’année 2007. Comme on dit, le plus incroyable est qu’les miracles existent vraiment.

samedi, mars 18, 2006

The Buoy (English version)

The man stood up and looked straight ahead. The sea lay behind the figures of the few men and women who had preferred the early morning beach to a late rise that day. He was aiming for the far buoy, which marked the boundary of the bay, but telling this to his wife was going to be no easy matter. She was afraid that something bad could happen to him if he ventured swimming farther out. The timing, however, was nearly perfect: there were just a few people in the water, it was nine o’clock in the morning, which meant that the water was going to be cold and he would be able to swim faster, but first and foremost, the motorboat had not started its daily cruising in a dangerously close vicinity to the buoy, yet.

“Where are you going?” she asked and looked up from her book “The Heart is a Lonely Hunter” by Carson McCullers.

“I’m going for a swim,” he said, “I might go just a bit out as the motorboat hasn't left yet.”

“Please don’t,” she said, her face entreating him to stay.

“Don’t worry. Everything will be fine. I won’t be going far.”

“You won’t be long, will you?” she asked looking him straight in the eyes.

“Everything will be fine… I’m telling you.”

“Think about us, Mariya and me” she said, her eyes pleading with him.

What nonsense, he thought, I’m always thinking of them. Couldn’t they understand that a bit out didn’t mean a kilometer out, it was just to the edge of the bay.

Fearing she could stop him if he stayed any longer, he turned his back to her and rushed for the water. He was wasting precious time. The motorboat could start any time now with the influx of new people on the beach. Indeed, he had to hurry up. He ran to the breaking waves on the beach covering a mosaic of broken clam shells. He carefully waded into the cold water as he wanted to avoid cutting himself on them. The water felt a bit colder than he had expected but this was only normal after last night’s storm had wreaked havoc on the small sea resort. The only way to enter such water is with full submersion of the body. The sudden cold can be dealt with within seconds. With these thoughts in mind he put on his goggles, took a deep breath and plunged forward. Cold waves instantly enwrapped his entire body covering it with goose bumps, his face feeling instant pain from the sharp coldness of the sea.

Once in the water, a green forest of seaweed instantly unfolded before his eyes undulating slowly with the stately motion of the waves. He glided over them feeling as though he was on a plane cutting low on the green forest. He had decided to swim only breaststroke to the buoy. He was going to be able to keep his strength that way and would be able to enjoy the panorama below him. Having passed the forest, he realized he had not seen the common dwellers of such habitats. The little fish might be a little farther out. A couple of strokes more and he found himself next to the first buoy. The depth there was around a meter and a half and he knew that very well. Wasting no time he went on as there was still a long way to the distant buoy. Also, he would have to listen to the nerve-wrecking constant buzz of the motorboat. If it went out he would have to come back immediately. He breathed in and slid forward, breathing out under the water, the only sound he could hear being that of the bubbles coming out of his mouth. The motorboat was apparently still waiting for clients and that gave him good chances for success.

The next moment he saw them. The small fish. They blinded him momentarily reflecting the sunlight of the strong July sun like a huge piece of mica and darted sideways so he could pass. He smiled to himself appreciating their courtesy and made more powerful strokes forward. Gradually the seaweed disappeared; bigger fish began to be seen, goby most likely, as far as he could tell and the sand underneath turned into miniature dunes formed by the perpetual motion of the waves back and forth. He swam ever onward with a steady relatively fast pace and soon felt that his left leg seemed to be slightly cramped. That was normal, too. It might be that he pushed harder with it. For an instant he thought that even if one of his legs got cramped, he should have no problems making it back to the shore. As he newly came up the surface he looked at his goal. It called him ever so distant and he put all his might into the forward motion to it. Suddenly he remembered what his wife had said on the beach and smiled to himself again. He really should speed it up or she might be worried and that was the last thing he wanted her to feel.

He could still see the sand bottom ever so clearly although where he was it was probably three meters deep. It crossed his mind that the sea was unbelievably clean so far down south. As he swam, though, he suddenly felt a colder layer of water cut through him like a knife. Last night’s storm had done its work well shuffling the water layers in an unpredictable way. He worked harder with his arms and legs, the sea massaging his body and giving him new strength. Up and down, up and down, with each complete stroke he could feel he was gaining distance to the coveted spot.

The buoy stood closer now. He paused for a second, turned around and looked at the beach. It stretched out long and distant and the parasols looked like small toy umbrellas ridiculously stuck in the sand. He felt invigorated being near his so desired goal. Very soon he was going to be there. He was savoring success, the water element was going to be conquered once more and once more he was going to prove himself to himself, mission accomplished. This was his one and only chance to do so as they were going back home the same day.

He stepped up the tempo as he inhaled and exhaled faster leaving the bottom deeper down, still as crystal clear as ever with the last grain of sand visible to the eye. There were no more than ten meters to the buoy when the sea bottom suddenly vanished from his view. He inadvertently stopped and peered though his goggles into the blackness below. What had happened? Perhaps a new swath of seaweed, or he might have reached the depth of ten meters where the bottom would not be seen even in a clear sea like this. He took a deep breath and lurched forward. Now he wanted to get to the buoy as fast as possible and go back right away. He could not figure out why the fact that he could not see the bottom had affected him in such a manner. There were hardly three meters to the buoy now when all of a sudden his heart began beating fast and strong in his chest. He stopped bewildered and tense. There was no time to think about why this was happening as his heart pounded painfully in his chest against the thick layers of sea all around him. He felt his face cramped, this being accompanied by two hands which grabbed him by the throat and held him tight. He frantically turned around and looked at the shore.

It loomed distant and hazy. The people, small as Lilliputians, crawled on it among some pins, which had to be the parasols. The sun shone hard in the sky beating down on him and there was not a single cloud there. He felt he was suffocating and his heart was beating faster and faster. If he waved for help, they would not see him. Even if they interpreted this as a call for help it would be too late for them to come to the rescue. If he cried, they would not hear him. The distance between him and them was too big and over all lay the sea with its thousands of sounds muffling his feeble attempts to break free. He then decided to lie on his back to calm himself down, but this only resulted in his heart beating even faster and more painfully. He thought it would burst at any moment now. Suddenly it dawned on him that he was going to die there, a few meters away from his nemesis-desire on a bright sunny day and the world was going to go on in its course – indifferent and happy without him. Happy with the exception of his wife and daughter.

This thought brought him with full force back to reality. There was no one to help him but himself at this moment. He turned on his chest and made for the shore. The bottom was an unfathomable black hole, which seemed to reach out for his beating heart to suck it in and silence it for ever. He closed his eyes and slid forward again. He felt he was making a progress despite all odds and as he swam towards the shore with his eyes closed he could be bothered no more by the black hole gaping open wide for him below. He plodded onward breathing in and out at regular intervals. If nothing else, he was coming close to the shore where she was waiting for him. His will power seemed to be giving fruits now. He was shortening the distance to the shore and each wave behind him propelled him forward. His heart lessened its frantic pace but still beat strong in his chest. The shore was definitely coming near now. He looked through his goggles and saw the bottom anew, still so clear and shiny with sun shadows chasing one another. He smiled and thought: it’s not gonna be today, thanks God. There would be more life for him and he was going to be part of the bright sunny day once more.

He was going to come ashore and the mission would be almost done. Soon he came near the first buoy and the seaweed. This time he looked at them as if he were a part of them, as if they were where he belonged. And indeed, he had come from a stroll in the green forests of the sea where he might have stayed for good.

He stepped on the beach slightly reeling and feeling faint. He walked slowly to his wife who was sitting on her towel, her book put aside.

“It seems to me you went really far,” an intense look on her face.

“Yes, he said slumping on his towel. He felt weak but his heart beat strong and steady.

“Did something happen?” she asked.

“Just a little stroll a bit farther out,” he said, “I said goodbye to the sea, for now.”